Ces dernières années, nous assistons à une croissance de la communauté arménienne de Suisse avec l’apparition de nouveaux groupes informels qui essaient de créer une vie arménienne dans différents cantons. L’enthousiasme et le dynamisme de ces groupes non-traditionnels ont été mis à contribution notamment pendant la période de la guerre de 44 jours et semblent avoir le potentiel d’apporter un nouveau souffle à notre communauté.
Armenian Academics in Zurich est un groupe privé sur facebook. Artzakank a rencontré Shahe Shahinian et Manuk Malkhasyan – administrateurs du groupe avec Artak Malkhasyan et Margarita Avanesova – pour faire connaissance avec leur groupe et le présenter à nos lecteurs et lectrices.
Artzakank – Comment et pourquoi le groupe a t-il été constitué?
Shahe Shahinian – Il y a environ quatre ans, j’ai rencontré Sarkis Iliozer et Nshan Andreasian, tous les deux originaires de France, qui à l’époque, travaillaient à Zurich. Nous avons décidé de nous revoir une fois par mois entre amis arméniens. Notre petit groupe, composé de six personnes lors de notre première rencontre, s’est élargi avec le temps. J’ai alors ouvert une page facebook pour atteindre davantage de personnes. Puis, Sarkis et Jonathan ont quitté la Suisse et nous avons été rejoints par d’autres membres dont Manuk Malkhasyan et son frère Artak.
Manuk Malkhasyan – La particularité de ce groupe est qu’il a été créé par des Arméniens expatriés provenant de différents pays et qui travaillent en Suisse.
A. – Pourquoi avez-vous choisi le nom de Armenian Academics?
Sh. Sh. – Il fallait adopter un nom pour ouvrir une page facebook et vu que les membres du groupe avaient tous fait des études supérieures et que nous souhaitions atteindre les Arméniens et Arméniennes dans la tranche d’âge 30-40 ans, nous avons choisi ce nom fortuitement. Contrairement à ce que ce nom suggère, nous sommes ouverts et acceptons toutes les personnes vivant en Suisse qui veulent faire partie de notre groupe, indépendamment de leur âge ou niveau d’études.
M.M. – Nos membres travaillent dans des domaines très variés: le secteur bancaire, les assurances, le commerce, les technologies de l’information, la médecine, etc. Nous avons également des étudiants d’Arménie qui préparent leur doctorat dans les universités de Zurich.
A. – Quels sont les sujets de discussion lors de vos rencontres et quelle est la langue des conversations?
Sh. Sh. – Notre principal soucis est la préservation de l’identité arménienne. Nos discussions portent sur les différents moyens de préserver la langue et la culture arméniennes. La langue de communication est l’arménien et parfois l’anglais. Le fait de pouvoir parler en arménien pendant nos rencontres est un vrai plaisir pour nous. Certains de nos membres ont déjà des enfants et nous pensons qu’il est important d’assurer à la nouvelle génération un milieu social arménien qui favorise l’apprentissage de la langue.
M. M. – Pour nous, c’était une sorte d’épreuve: serait-il possible pour notre génération de rassembler les Arméniens de différents pays autour d’un dénominateur commun? Par exemple, mon frère et moi sommes originaires d’Arménie, Shahe est né en Syrie, nous avons des membres nés dans d’autres pays. Nous voulons casser les préjugés sur les fossés existants entre différents groupes d’Arméniens.
A. – Quelles sont les activités que vous avez organisées à ce jour?
Sh. Sh. – Nous avons organisé des repas, des barbecues et d’autres sorties qui ont eu beaucoup de succès. Les repas de Noël, en particulier, sont très populaires. Le dernier a eu lieu en janvier 2020 dans un musée de Zurich où nous avons préparé et servi des spécialités arméniennes. Malheureusement nous avons dû interrompre nos activités à cause de la pandémie.
M. M. – Pendant la guerre de 44 jours, quelques membres de notre groupe, conjointement avec d’autres personnes, ont organisé une manifestation à Zurich (8 octobre 2020). Nous avons également participé aux différentes actions humanitaires et autres qui ont eu lieu dans le cadre de cette guerre. Nous avons beaucoup de projets mais attendons la fin de la pandémie pour commencer à les concrétiser. Nous devons tout d’abord nous constituer en tant qu’association et souhaitons que l’assemblée constitutive soit tenue avec la participation de toute personne désireuse d’y adhérer.
A. – Combien de personnes participent à vos rencontres?
Sh. Sh. – Nous avons plus de 200 abonnés à notre page facebook. S’agissant des rencontres mensuelles, la participation varie entre 15 et 30 personnes. Mais les repas de Noël et les barbecues réunissaient environ 80 personnes.
A. – Que pouvez vous dire de la communauté arménienne de Zurich, combien de membres compte t-elle?
M. M. – Il est difficile de donner un chiffre. Je vis à Zurich depuis plus de 20 ans. Au début, la communauté était composée principalement de personnes issues de la diaspora traditionnelle (Turquie, Iran, Liban, Syrie, etc.). Petit à petit le nombre des Arméniens d’Arménie a augmenté de sorte qu’ils représentent actuellement, selon mon estimation, entre 40 et 50% de la communauté de Zurich. Contrairement à la diaspora traditionnelle, les Arméniens d’Arménie ne sont pas encore intégrés pleinement dans les organisations communautaires. Par contre, ils viennent plus facilement à nos rencontres après avoir entendu parler de notre groupe de jeunes via facebook ou par des amis.
Sh. Sh. – A chacune de nos rencontres, nous recevons de nouvelles personnes et cela nous fait très plaisir.
A. – Que pensez-vous des relations entre les organisations de la communauté?
Sh. Sh. – Je trouve que les relations entre les organisations de Genève et de Zurich sont très faibles probablement à cause de la barrière de la langue. Mais pendant la période de la dernière guerre en Artsakh, nous avons fait la connaissance de plu-sieurs jeunes très actifs dans d’autres organisations et je pense que nous pouvons envisager une éventuelle collaboration avec eux dès que possible.
M. M. – Nous sommes convaincus de l’importance de la coopération entre les différentes organisations. Il est primordial d’avoir des structures locales dans toutes les régions et d’essayer de collaborer ensemble. Selon l’exemple suisse, nous devons franchir la barrière de la langue. Je suis optimiste à ce sujet et pense que la nouvelle génération sera capable de réussir ce pari.
(Propos recueillis et traduits de l’arménien par Maral SIMSAR)