INTERVIEW EXCLUSIVE AVEC L’AMBASSADEUR ANDRANIK HOVHANNISYAN

Par deux décrets du Président de la République d’Arménie du 11 avril 2019 et du 7 juin 2019, vous avez été nommé respectivement Représentant permanent de la République d’Arménie auprès de l’Office des Nations Unies et d’autres organ-isations internationales à Genève et Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire auprès de la Confédération suisse. Pourriez-vous présenter à nos lecteurs votre parcours académique et professionnel?

Tout d’abord, je voudrais vous remercier pour l’interview. Je vous félicite également, ainsi que le périodique « Artzakank », pour le travail accompli tout au long des années en faveur de la patrie. C’est un grand honneur pour moi de représenter l’Arménie à la fois dans un pays ami comme la Suisse et auprès de l’Office des Nations Unies et d’autres organisations internationales à Genève. Avant ma nomination dans cette ville, j’avais accumulé plus de vingt ans d’expérience diplomatique en travaillant notamment dans les représentations arméniennes à Damas, à Vienne et à Washington, ainsi qu’en occupant divers postes au Ministère des Affaires étrangères. J’ai étudié à l’Université d’État d’Erevan et suivi des cours à l’Université du Caire ainsi qu’à Fletcher’s School of Law and Diplomacy à Boston. Je suis titulaire d’un PhD en histoire.

Après la révolution de velours, quels sont les changements intervenus dans les activités des collaborateurs du Ministère des Affaires étrangères?

Il convient de noter que la révolution de velours visait à édifier une société démocratique fondée sur les droits de l’homme et les libertés fondamentales. Il est naturel que sur la scène internationale, l’Arménie poursuive les mêmes principes et valeurs qui sous-tendent le changement démocratique de notre pays. La diplomatie arménienne œuvre pour la souveraineté et la sécurité de notre pays, ainsi que pour la protection de nos citoyens et de nos intérêts à l’étranger. En politique étrangère, nous sommes guidés par les principes de souveraineté, de panarménité et d’interaction, la priorité étant les intérêts de l’État arménien, l’unité Arménie-Artsakh-Diaspora et les objectifs nationaux ainsi que la coopération internationale mutuellement bénéfique et basée sur l’égalité des droits.

J’ajouterais également que la révolution de velours en Arménie n’avait aucune orientation géopolitique, et la meilleure preuve en est le fait que l’Arménie n’a pas entrepris des démarches en matière de politique étrangère visant à changer les rapports de force entre les puissances mondiales et s’est engagée à établir ses relations internationales sur le principe de souveraineté.

L’an dernier, le Premier ministre Nikol Pashinyan et cette année le Président Armen Sarkissian a participé au Forum économique mondial de Davos. A cette occasion, des réunions d’affaires ont eu lieu à Zurich. Ces réunions et d’autres rencontres similaires qui ont lieu régulièrement en Suisse, ont-elles entraîné des résultats concrets à ce jour?

Le Forum économique mondial de Davos offre une multitude d’opportunités, en particulier pour établir et renforcer des relations avec les principaux acteurs économiques mondiaux. L’Arménie tire considérablement profit de cette occasion. Le Forum de Davos offre également des opportunités en matière de relations politiques. En particulier, du point de vue des relations arméno-suisses, il convient de noter que c’est à Davos qu’a eu lieu l’année passée la rencontre du Premier ministre arménien avec le  Président de la Confédération, et cette année celle du Président de l’Arménie avec le Président du Conseil national suisse. Ces rencontres sont importantes pour nos relations bilatérales.

Comme vous l’avez mentionné, à la veille du forum de Davos, sur l’initiative de la Chambre de commerce arméno-suisse et l’Ambassade d’Arménie une réunion a eu lieu à Zurich avec des hommes d’affaires suisses. Ces réunions sont l’occasion de présenter, à travers un contact direct, l’économie arménienne, le climat d’investissement, le processus des réformes, le cadre juridique et tout ce qui intéresse les hommes d’affaires présents en Arménie ou ayant des projets à cet effet. Naturellement, de telles réunions sont importantes pour créer de nouvelles relations et aborder de nouvelles idées. Dans le même temps, les principales branches traditionnelles du commerce entre l’Arménie et la Suisse telles que la vinification, l’horlogerie, la bijouterie et l’exploitation minière, continuent leur développement. Il convient de noter que l’année dernière, les exportations de l’Arménie vers la Suisse ont considérablement augmenté. Je suis convaincu que les rencontres dans ce format jouent un rôle important dans le développement des relations économiques et laissent un impact positif.

de g. à d. Perj Boshnaghyan, Assistant de l’Ambassadeur, Varduhi Sahakyan, Deuxième Secrétaire et Consul par intérim, l’Ambassadeur Andranik Hovhannisyan, Nayiri Petrosyan, Ambassadeur adjoint, Arminé Petrosyan, Deuxième Secrétaire, Arsen Kotanjyan, Deuxième Secrétaire

Quels sont les principaux domaines d’activité ou les priorités de la Représentation permanente de l’Arménie auprès de l’Office des Nations Unies et d’autres organisations internationales à Genève, ainsi que les réalisations récentes?

Genève accueille un certain nombre d’organisations internationales engagées dans la coordination de la coopération internationale dans des domaines très importants. En tant que pays défenseur de la démocratie, l’Arménie porte une grande estime au travail du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies. Cette année, pour la première fois, notre pays apportera sa contribution à cette plateforme internationale en tant que membre à part entière. Rappelons que l’Arménie a été élue au Conseil des droits de l’homme dans un contexte concurrentiel, remportant les voix de 144 États membres de l’ONU, et c’est une réalisation importante pour notre pays, ainsi qu’un témoignage de son prestige sur le plan international.

L’Arménie a une longue expérience de coopération positive avec le Bureau du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (UNHCR). Ces dernières années, elle s’est reflétée notamment dans le contexte de l’aide apportée aux Syro-Arméniens qui ont cherché refuge en Arménie. La Croix-Rouge Internationale (CICR) a été l’une des premières organisations internationales à ouvrir un bureau en Armé-nie. Elle a également une mission permanente au Haut-Karabakh. En général, les deux organisations que j’ai mentionnées jouent un rôle essentiel dans le cadre du conflit du Haut-Karabakh.

L’Arménie se concentre également sur la coopération avec des organisations telles que l’Organisation Inter-nationale du travail (OIT), l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM), l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), l’Union Internationale des Télécommunications (UIT), etc.

Récemment, une coopération dynamique s’est développée dans le cadre de la Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement (CNUCED), où un rapport sur l’étude de la politique d’investissement de l’Arménie a été présenté en novembre de l’année dernière. La Mission permanente de l’Arménie organise également des événements et expositions parallèles à l’Office des Nations Unies à Genève, présentant notre pays à la communauté internationale.

En octobre 2019, l’Arménie a été élue membre du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies pour la période 2020-2022. Outre vos efforts et vos réalisations en matière de la prévention du crime de génocide, sur quelles autres questions concentrerez-vous vos travaux au sein de ce Conseil?

Vous avez raison de dire que pendant de nombreuses années, l’Arménie a contribué largement aux efforts internationaux pour la prévention du génocide et des crimes contre l’humanité et elle se présente aujourd’hui à la communauté internationale comme un pionnier dans ce domaine. Nous sommes déterminés à continuer à œuvrer dans ce sens, en particulier pour le développement de mécanismes internationaux d’alerte rapide et de prévention de nouvelles violences et de nouveaux crimes afin que le « plus jamais » ne reste pas un simple slogan mais devienne une réalité.

Dans le même temps, l’Arménie a également contribué à la mise en œuvre d’autres mesures en faveur de l’agenda international des droits de l’homme, agissant en tant qu’initiateur et intervenant constructif. Citons à titre d’exemple, le renforcement de la société civile, ainsi que la protection des droits des femmes et des filles, et la création de l’égalité des chances. Ce n’est pas un hasard si l’année dernière l’Arménie a été élue présidente de la Commission de la condition de la femme des Nations Unies pour ses sessions 2020-2021.

L’Arménie a toujours fait entendre sa voix pour condamner toute manifestation de discrimination et de racisme. Nous concentrons notre attention sur la protection des minorités ethniques et religieuses, en particulier en temps de crise, comme la situation au Moyen-Orient. Une grande attention est accordée à la lutte contre les discours de haine et de violence.

Les approches de l’Arménie en matière de droits de l’homme sont ancrées dans l’engagement universel de « n’ignorer personne », conformément au principe selon lequel toute personne a tous les droits et libertés, sans aucune distinction, y compris le statut politique ou juridique de son lieu de résidence. C’est notre approche fondamentale à l’agenda international des droits de l’homme.

À la lumière des nouvelles réalités en Arménie, comment envisagez-vous de développer davantage les relations entre l’ambassade et la communauté et de renforcer les liens des membres de la communauté avec l’Arménie et l’Artsakh?

Il convient de noter que la communauté arméno-suisse entretient traditionnellement des relations étroites avec l’Arménie et l’Artsakh, où un grand nombre d’Arméniens de Suisse mènent diverses activités économiques, culturelles et caritatives depuis de nombreuses années. De même, l’Ambassade d’Arménie en Suisse a toujours bénéficié du soutien et de la solidarité de la communauté. Je voudrais saisir cette occasion pour exprimer ma profonde gratitude pour cette attitude chaleureuse et attentionnée. L’Ambassade, pour sa part, s’efforce à la fois de préserver ces liens traditionnels et de les renforcer et développer autant que possible. Les activités culturelles de l’Ambassade, l’organisation de concerts et d’expositions, le maintien d’un contact permanent avec la communauté, y compris l’organisation des rencontres avec la participation d’invités d’Arménie de haut rang dans différents formats, notre interaction avec l’église, l’école, les structures communautaires servent cet objectif. Comme je dis sou-vent, « les portes de l’Ambassade sont ouvertes à tous nos compatriotes ». Nous nous efforçons de répondre autant que possible aux demandes et de donner suite aux suggestions sur les relations entre l’Arménie et la Diaspora et sur nos activités en tant que représentation diplomatique de l’Arménie en Suisse. Je vous prie, chers compatriotes, veuillez saisir cette occasion et soyez actifs.

 (Entretien réalisé et traduit de l’arménien par M.S. en février 2020)

2020-05-24T00:13:47+02:00 24.05.20|ARMÉNIE & ARTSAKH, INTERVIEWS, SUISSE-ARMÉNIE|

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