INTERVIEW EXCLUSIVE AVEC LE NOUVEAU MINISTRE DE LA DIASPORA MKHITAR HAYRAPETYAN

« Le plus important est de renforcer les liens avec la patrie ainsi que de promouvoir l’intérêt pour la maîtrise de la langue et la culture arméniennes »

La nomination de Mkhitar Hayrapetyan au poste de ministre de la Diaspora en mai dernier a été accueillie avec une certaine méfiance dans les milieux conservateurs de la Diaspora, notamment en raison de son jeune âge. Mais la méfiance initiale a vite cédé sa place à l’étonnement voire même à l’admiration lorsqu’on a appris que le plus jeune des membres du gouvernement Pashinyan était le concepteur de l’idée de la marche « kayl ara merjir Serjin » (fais un pas et rejette Serge), le point de départ de la Révolution de Velours. Vu l’étendue du champ d’action de son ministère, Mkhitar Hayrapetyan s’est tout de suite retrouvé sous le feu des projecteurs des médias.  D’autre part, il partage avec le Premier ministre et un grand nombre de hauts-fonctionnaires de la nouvelle équipe l’esprit ouvert et communicatif ainsi que la détermination de mener à bien le programme du nouveau gouvernement. Il suffit de suivre sa page Facebook et ses interventions publiques pour s’en rendre compte.

Né en 1990, Mkhitar Hayrapetyan est diplômé du Département des études orientales de l’Université d’État d’Erevan. Auteur d’articles scientifiques, il a travaillé en tant qu’expert sur le Moyen-Orient et surtout la Turquie pour plusieurs journaux locaux. En 2016, il a fondé le Civic Education and Youth Empowerment Center. Membre fondateur du parti Contrat Civil, il fait partie de son Conseil politique. De 2016 à 2018, il a été le coordinateur des affaires de la Diaspora au sein de ce parti.

Artzakank a réalisé cette interview exclusive avec M. Hayrapetyan qui, malgré son emploi de temps chargé, a accepté de répondre à nos questions.

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Après la Révolution de Velours, quels sont les objectifs du ministère de la Diaspora?

Tout d’abord, je souhaite remercier tous les Arméniens pour l’aide, l’enthousiasme et le soutien manifestés pendant la période de la Révolution de Velours. Le fait que le mouvement de désobéissance pacifique qui a commencé à la veille du 100ème anniversaire de la reconstitution de l’État arménien ait eu une portée nationale était symbolique. La Diaspora est devenue la toile de fond de la révolution d’amour et de solidarité, qui a triomphé grâce à la volonté de toute la nation, créant ainsi un nouvel éveil, en renforçant l’État arménien et rehaussant l’image du pays. Bien sûr, nous remercions également les médias de la Diaspora, y compris votre journal, pour avoir présenté de manière appropriée le processus et la philosophie de la renaissance nationale.


Pour répondre à votre question, le ministère de la Diaspora a aujourd’hui trois objectifs principaux: promouvoir le processus de rapatriement, s’engager dans la préservation de l’identité arménienne dans la Diaspora et réunir le potentiel intellectuel des Arméniens dans le monde. Je n’ai pas peur d’avoir des rêves ambitieux et je suis confiant qu’avec l’aide de la Diaspora et les efforts de chacun, nous raviverons l’idée du rapatriement, nous construirons ensemble cette Arménie, où chaque Arménien voudra retourner en assumant les droits et responsabilités de citoyen, maître de son pays. Je pense que ce processus est irréversible.

Dans une de mes interviews,  j’ai mentionné qu’indépendamment de nos idées sur le rapatriement, la Diaspora existe aujourd’hui et existera encore demain. En ce sens, nous avons encore beaucoup à faire  pour la préservation de l’identité arménienne dans la Diaspora. Je ne souhaite pas m’étendre sur les processus de mondialisation et de nivellement, mais la préservation de l’identité arménienne dans la Diaspora est une priorité pour nous. Le plus important est de renforcer les liens avec la patrie ainsi que de promouvoir l’intérêt pour la maîtrise de la langue et la culture arméniennes.

Nous avons beaucoup à faire pour consolider le potentiel pan-arménien. A l’avenir, nous envisageons d’organiser un Startup Summit avec la participation des jeunes de la Diaspora, ce qui contribuera à réunir les idées innovatrices  et le potentiel de la jeunesse pan-arménienne.

A travers quels projets comptez-vous mettre en œuvre ces idées? Allez-vous maintenir les programmes déjà en cours et les évènements pan-arméniens ou avez-vous décidé d’y apporter des changements? 

En ce qui concerne la première question, j’y ai déjà partiellement répondu. Vous savez probablement que cet été, nous avons réuni les programmes «Ari toun» et «École d’été Spyurk» du ministère de la Diaspora en un nouveau programme éducatif «Qayl depi toun». Ce programme s’adresse aux enfants et jeunes de la diaspora âgés de 13 à 21 ans et se déroulera du 10 au 24 août. Il y avait de sérieux soupçons sur des risques de corruption, et nous avons décidé de fusionner les programmes en excluant tous ces facteurs, mais en même temps, en mettant en place les programmes prévus. Mais l’été prochain, «Qayl depi toun» se déroulera par étapes et tous les jeunes Arméniens de la Diaspora qui souhaitent participer, en auront la possibilité.

Le ministre joue aux échecs avec un jeune de la Diaspora

Bien sûr, il y aura aussi des changements dans les autres programmes, à la fois de contenu et de format, avec une nouvelle pensée, un nouveau style et une nouvelle logique de développement de relations basée sur l’amour et la sincérité.

Une grande partie de la Diaspora reste à l’écart des organisations arméniennes et/ou reste indifférente aux évènements qui ont lieu en Arménie et en Artsakh. Dans cette majorité, il y a des professionnels ayant réussi dans différents domaines, qui ne sont pas connus des leaders des communautés ou sont ignorés par ces derniers. Quels moyens allez-vous mettre en place pour créer des liens et communiquer avec cette partie importante des communautés de la Diaspora?

C’est effectivement un problème. Je souligne souvent qu’une révolution doit aussi avoir lieu dans les relations Arménie-Diaspora. Nous devons travailler dans une atmosphère plus ouverte et coopérative. C’est seulement de cette manière que la Diaspora pourra sentir le pouls de l’Arménie et le dialogue servira de base à notre coopération. Je déclare de manière confiante que le ministère que je dirige ne manifestera plus aucune approche discriminatoire.

Pour ce qui est d’établir un dialogue ou des liens, je peux indiquer qu’à cet égard, les dernières technologies nous offrent de nombreuses opportunités. Nous sommes atteignables pour chaque membre de la Diaspora et le ministère de la Diaspora doit représenter les intérêts et les droits de chaque Arménien à travers le monde.

J’ai bon espoir qu’un champ d’information pan-arménien sain et viable se mettra en place qui permettra aux Arméniens du monde entier de recevoir des informations impartiales et pratiques sur ce qui se passe en Arménie, en Artsakh et dans la Diaspora.

Quelques représentants de la Diaspora occupent des postes dans votre ministère. Pouvez-vous nous présenter ces personnes  et les tâches qu’ils seront amenés à accomplir?

Dès mon premier jour de mandat, j’ai annoncé que le ministère de la Diaspora comprendra également des collaborateurs de la Diaspora. Malheureusement, il y a certaines contraintes légales à ce propos. Pour les postes discrétionnaires du ministère, je n’ai pas hésité à engager des personnes nées et élevées dans la Diaspora, ces dernières pouvant grandement contribuer au travail efficace du ministère.

Mon adjoint, Babken Der Grigorian, est né à Paris et a grandi et étudié aux États-Unis. Économiste de profession, il a collaboré avec un certain nombre d’organisations internationales de défense des Droits de l’Homme et d’organismes de développement, notamment The HALO TrustTransparency International et le PNUD. Depuis février 2018, il a été conseiller du défenseur des droits de l’homme de la République d’Artsakh tout en assumant le poste de conseiller économique pour le Vice premier ministre de la République d’Arménie sur une base volontaire.

Mon conseiller (sur une base volontaire), Vahé Keushgueryan, est né à Homs et a grandi à Beyrouth. Il a obtenu un bachelor en informa-tique de l’Université La Verne de Los Angeles. Après avoir vécu 10 ans à San Francisco, Vahé a déménagé en Italie. Il vit en Arménie depuis 2009 avec sa famille et a fondé ici la société de conseil en vin «Semina Consulting». Actuellement, il est le propriétaire de «Wine Works», le co-fondateur et le président du conseil de «EVN Report» et de «Impact Hub Yerevan», ainsi que le co-fondateur de l’Académie du vin d’Erevan (EVN).

Mon assistante, Lucy Vana Garabedian, est une Arménienne de Syrie. Elle est diplômée du département de journalisme de l’Université d’Etat d’Erevan et étudie actuellement les relations publiques et la technologie de communication. C’est une jeune femme brillante, intelligente et active.

Je peux assurer que leur présence a apporté une nouvelle couleur et un nouveau souffle au ministère.

Est-ce qu’une visite en Suisse fait partie de votre agenda? Si oui, quand?

Mon agenda est relativement chargé et j’ai beaucoup d’engagements et de réunions dans un proche avenir. Je n’ai pas encore prévu de me rendre en Suisse, mais j’espère pouvoir le faire pendant mon mandat afin de faire connaissance avec la communauté arménienne.

(Propos traduits de l’arménien par P.S.)

 (Photos de la page facebook du ministre Mkhitar Hayrapetyan)

2018-08-03T12:41:13+02:00 26.07.18|ARMÉNIE & ARTSAKH, INTERVIEWS|

One Comment

  1. DERDERIAN 7 août 2018 at 8 h 56 min

    Félicitations pour cet interview

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