La guerre en Artsakh a entraîné une forte mobilisation des Arméniens à travers le monde. Pendant 44 jours, nous avons été témoins d’un engagement sans précédent à tous les niveaux notamment de la part des jeunes de nos communautés.
En Suisse, cet engagement s’est traduit par de multiples actions organisées dans plusieurs cantons.
Le 4 octobre 2020, une rencontre a eu lieu avec l’Ambassadeur d’Arménie, M. Andranik Hovhannisyan, qui a présenté les derniers développements sur le terrain et a exposé les besoins et les moyens d’aide.
Dans le cadre de la campagne de collecte de fonds lancée par le gouvernement arménien, un phonéton a été organisé en faveur du Fonds Arménie (Himnadram). Grâce aux efforts d’un cinquantaine de bénévoles de toutes les régions linguistiques de Suisse, plus de CHF 650’000 ont pu être récoltés.
En parallèle, le Centre arménien de Troinex est devenu un centre logistique pour la collecte de matériel médical tels que des lits d’hôpital, du matériel de monitoring, des chaises roulantes et médicaments ainsi que des couvertures, des sacs de couchage et des habits chauds. A ce jour plus de 20 palettes d’aide humanitaire ont été emballées et acheminées par avion-cargo vers l’Arménie (depuis la France).
Pendant cinq week-ends consécutifs, un vide grenier, des ventes de pâtisseries confectionnées par les dames de notre communauté et des produits BAF ont été organisés sur le parvis de l’église et ont permis de récolter près de CHF 30’000.-. Ces fonds ont été affectés à Himnadram et à différents projets d’aide aux réfugiés d’Artsakh.
Pendant toute la durée de la guerre plusieurs manifestations spontanées ou organisées ont eu lieu dans différents cantons. Il est difficile de les citer toutes, tant elles étaient variées en forme et en terme de nombre de participants. Une première manifestation spontanée a eu lieu le 3 octobre sur la Place fédérale à Berne. Placée sous le thème de l’Arménie et l’Artsakh », elle était organisée par l’Association Suisse-Arménie avec la participation de plusieurs personnalités politiques suisses dont le conseiller national PDC Stefan Müller-Altermatt et l’ancien conseiller national et l’ancien président des Verts Ueli Leuenberger, qui ont pris la parole.
Le 8 octobre, à Züghusplatz à Zurich, une manifestation pacifique a eu lieu sous le thème de « Together for Armenia and Artsakh » dans le but de sensibiliser l’opinion publique suisse et attirer l’attention sur la catastrophe humanitaire qui était en train de se produire.
Le 16 octobre, à l’appel de la communauté arménienne de Suisse, plus de 500 personnes ont manifesté à Genève pour demander l’arrêt des combats au Haut-Karabagh et le droit à l’auto-détermination de la population. La manifestation, qui a eu lieu avec des flambeaux, a reçu le soutien d’une trentaine de partis et d’organisations genevoises, dont le PDC, la gauche et la Ligue suisse des droits de l’homme. Après avoir formé une chaîne humaine le long du quai, en face du Palais Wilson, le siège du Haut-commissariat aux droits de l’Homme, les participants ont marché jusqu’à la place de Nations. L’action a été entièrement silencieuse. De nombreuses banderoles et masques de protection reproduisant le drapeau arménien étaient visibles.
Le 29 octobre 2020, la communauté arménienne de Suisse a organisé une manifestation silencieuse devant l’Office des Nations Unies à Genève. Portant des panneaux sur lesquels on pouvait lire « La neutralité tue », « Belle Suisse, où sont passées tes valeurs humanistes? », « L’état azéri ment, nos médias écoutent », « Votre silence tue des civils innocents », « Nettoyage ethnique en cours, wake up Europe » et d’autres slogans, les manifestants habillés en noir ont réclamé la condamnation de l’agression turco-azérie et la reconnaissance de l’indépendance de l’Artsakh. Le même jour, des actions similaires ont eu lieu devant les sièges de l’ONU à Vienne et à New York.
D’autres actions ont été menées sur le plan médiatique. Dans un communiqué de presse du 28 septembre, l’Association Suisse-Arménie (ASA) a appelé les forces politiques suisses à condamner l’attaque militaire lancée la veille par les forces azerbaïdjanaises comme une violation du droit international. L’ASA a fait remarquer que « le silence de la communauté internationale sur l’agression azérie équivaudrait à consentir à la violence de l’Azerbaïdjan. Ne pas reconnaître la responsabilité de l’Azerbaïdjan dans cette offensive de grande envergure contre des civils pacifiques au Karabagh reviendrait à récompenser son comportement agressif au niveau de l’ État. (…) Nous souhaitons voir la paix dans l’Artsakh et demandons ici à toutes les démocraties occidentales et notamment à la Suisse de s’unir pour protéger ce peuple pacifique et ses efforts pour maintenir sa souveraineté et son indépendance. »
Le 3 novembre 2020, la co-présidence du Groupe parlementaire d’amitié Suisse-Arménie a diffusé un communiqué de presse dans laquelle elle exprimait sa préoccupation quant à la persistante agression de l’Azerbaïdjan, appuyé par la Turquie, contre le Haut-Karabagh. Elle s’est adressée à l’ensemble de ses collègues parlementaires soulignant la conviction que la reconnaissance de l’indépendance du Haut-Karabagh permettrait de protéger la population arménienne.
Le 14 décembre 2020, une délégation composée de trois co-présidents du Groupe parlementaire d’amitié Suisse-Arménie ainsi que de deux représentants de la Communauté Arménienne de Suisse, a remis aux représentants des Services du Parlement suisse une pétition demandant à la Confédération de reconnaitre le droit à la vie et à l’autodétermination des Arméniens du Haut-Karabagh.
Cette pétition en ligne, présentée dans les trois langues nationales et en anglais, lancée par le Comité Suisse-Karabagh et forte de presque 21’000 signatures, demande à l’Assemblée fédérale et au Conseil fédéral de:
– Reconnaître le droit à la vie et à l’autodétermination des Arméniens du Haut-Karabagh comme seule possibilité pour leur garantir la sécurité sur leur terre ancestrale ainsi qu’une protection internationale.
– Sanctionner sur le plan économique et diplomatique l’Azerbaïdjan pour les crimes commis à l’encontre des Arméniens pendant la guerre déclenchée le 27 septembre dernier avec l’appui actif de la Turquie.
– Déployer une aide humanitaire conséquente en faveur de la population civile du Haut-Karabagh.
Dans les motivations, les signataires de la pétition soulignent que pendant la guerre, entre 90’000 et 100’000 habitants ont fui le Haut-Karabagh, déclenchant ainsi une catastrophe humanitaire. Les crimes de guerre de l’Azerbaïdjan (utilisation de bombes à sous-munitions et des munitions incendiaires au phosphore, décapitations, exécutions sommaires de prisonniers, recours à des mercenaires djihadistes syriens) ont été largement documentés. L’Azerbaïdjan ayant ainsi perdu tout droit moral sur le Haut-Karabagh et ses habitants, seule l’auto-détermination peut garantir leur sécurité.
En appui à cette pétition, 27 personnalités suisses ont signé une tribune intitulée Les Arméniens du Karabagh en danger: un remède, l’autodétermination, parue dans Le Temps du 17 novembre 2020.
Une autre pétition lancée le 16 octobre 2020 par l’EDU/UDF Suisse (Union Démocratique Fédérale) afin d’exprimer sa solidarité avec les Chrétiens arméniens persécutés au Haut-Karabagh a recueilli plus de 7500 signatures. Elle a appelé le Conseil fédéral et le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) à œuvrer pour une fin immédiate au conflit armé entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan; à assurer un soutien humanitaire urgent à la population civile du Haut-Karabagh; et à garantir que les entreprises opérant en Suisse sous contrôle azerbaïdjanais dont SOCAR ne puissent pas utiliser les bénéfices générés dans ce pays pour la guerre contre les civils du Haut-Karabagh.
Le 21 octobre 2020, Christian Solidarity International (CSI) a lancé une pétition à l’attention du Conseil fédéral en demandant à ce dernier la protection de la population du Haut-Karabagh. Dans une lettre du 7 octobre adressée au chef du DFAE le conseiller fédéral Ignazio Cassis, le directeur de CSI-Suisse John Eibner appelait le Conseil fédéral à donner une haute priorité à la prévention d’un génocide et à la protection de la population civile, en accord avec les instruments internationaux, ainsi qu’à l’acheminement rapide de l’aide humanitaire. Il recommandait d’interdire le transfert de matériel militaire suisse à la coalition anti-arménienne et de reconnaître le droit à l’autodétermination de la population menacée du Haut-Karabagh.
Par ailleurs des lettres ont été envoyées au nom de la communauté arménienne de Suisse à Amnesty International et Human Rights Watch pour demander leur soutien afin de prévenir un nettoyage ethnique imminente contre la population arménienne du Haut-Karabagh
Une autre lettre a été envoyée le 2 novembre 2020 au Secrétaire général de l’ONU Antònio Guterres invitant les Nations Unies à sanctionner les crimes de guerre commis par l’Azerbaïdjan et la Turquie, de reconnaître l’indépendance de la République d’Artsakh sur la base des principes de l’autodétermination, de faire acheminer de l’aide humanitaire à la population civile et d’assurer sa sécurité.
Le 15 novembre 2020, une lettre ouverte a été envoyée au nom de la communauté arménienne de Suisse aux co-présidents du Groupe de Minsk de l’OSCE (Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe) attirant leur attention sur les lacunes et les dangers du document signé par les présidents de la Russie, de l’Azerbaïdjan et le Premier-ministre de l’Arménie le 9 novembre 2020 et demandant sa révision. Dans une autre lettre adressée au président du Comité International de la Croix Rouge (CICR) M. Peter Maurer, la communauté arménienne de Suisse a demandé l’intervention de l’organisation pour accélérer l’échange des prisonniers de guerre entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan.
Il convient de noter que plusieurs autres actions ont été entreprises par des membres de notre communauté, à titre individuel ou en petits groupes, notamment par l’envoi de lettres aux rédactions des journaux pour protester contre la « neutralité » des médias.
Toutes ces actions n’auraient pas été possibles sans le dévouement et la persévérance d’un grand nombre de personnes de notre communauté et de nos amis. Nous ne pouvons que nous féliciter du formidable esprit de coopération qui s’est manifesté tout au long de cette période d’intense mobilisation. Les prochaines étapes seront beaucoup plus ardues et nous devons renforcer notre mobilisation pour aider l’Arménie et l’Artsakh à se remettre sur pied.
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