Oui, l’Arménie est à nouveau blessée, agenouillée, traumatisée. Or, le trauma entraine souvent la RESILIENCE, si bien connue par le peuple arménien. C’était le seul point positif de cette période dramatique que de constater la capacité exemplaire du peuple arménien de s’unir pour affronter la catastrophe, trouver des issues de secours, créer une chaine humanitaire. Dans la Diaspora, nous avons vu des centaines de collectes de fonds, des manifestations pacifiques pour secouer l’opinion publique, un flux d’articles dans les médias pour dénoncer les actions des pays belligérants, réveiller les pays amis d’Arménie et prévenir l’anéantissement d’un peuple ne demandant qu’à exister. Même chose en Arménie, avec la création de plusieurs plate-formes d’entraide malgré la sidération générale engendrée par le déclenchement de la guerre, à la fois redoutée et soudaine.
Dès le déclenchement de la guerre, les fondateurs de Miassine se sont joints à la mobilisation générale en répondant présents à titre personnel aux appels du Fonds Arménien Hayastan. Parallèlement, Miassine, avec l’association SPFA (Solidarité Protestante France Arménie), son partenaire de tous les temps, a coordonné une aide d’urgence aux plus démunis en Arménie et en Artsakh.
Dès les premiers jours de la guerre, l’aide d’urgence a été apportée aux familles déplacées. Ainsi, plus de 2 000 personnes ont reçu une aide ponctuelle à Erevan, Goris et Gumri. Cette aide en argent liquide, vêtements chauds, médicaments, ou chauffage, a été attribuée aux familles avec deux enfants et plus, dont les pères étaient au front ou blessés ou hélas, décédés. Les familles ont trouvé refuge chez des amis ou dans des centres mis à disposition par l’État.
Nous travaillons ensemble avec plusieurs associations à ce que cette aide d’urgence soit remplacée rapidement par des programmes d’appui à la réhabilitation, l’agriculture, la formation, etc. Un nouveau système de parrainage est mis en place pour renforcer la résilience, en appelant ce réseau «Cent femmes sans EUX… mais avec nous».
Miassine a travaillé avec SPFA et la fondation Azna-vour pour acheminer des produits de première nécessité en Arménie. Pyunik, l’Union arménienne des personnes avec handicap, est le partenaire local pour la distribution de cette aide. Par le même canal, un important stock de vêtements en jean sera acheminé vers l’Arménie et l’Artsakh, un geste de solidarité de l’entreprise Levi’s. Tout cela fut possible par la mutualisation des efforts, des contacts, des moyens…
Ce sont quelques exemples de partenariats réussis qui nous encouragent à rester fidèle à notre mission: on est plus fort Ensemble.
Nous avons reçu une demande urgente d’une caserne basée à Vardenis pour recevoir des équipements nécessaires pour la réparation de leurs installations et matériels. Miassine a offert ces équipements. Nous avons également commandé des sacs de couchage pour les plus nécessiteux.
Les bénévoles de Miassine ont organisé des sorties aux spectacles de fin d’année et de Noël arménien pour les enfants touchés par la guerre. Les enfants restent les plus vulnérables et leur monde de rêve ne doit pas être ébranlé. Les déplacés d’Artsakh, réfugiés dans la région de Chirak, participent également à notre projet pilote: l’initiation au ski de fond à Ashotsk.
Une fois l’aide d’urgence terminée, il est important de passer rapidement à la phase de reconstruction. Se redresser et agir ensemble dans un esprit de concorde pour la résilience et le développement de notre nation. La bonne coordination est et reste le défi auquel nous devons faire face pendant cette période, tout en tenant compte des leçons apprises lors des crises antérieures – depuis le tremblement de terre jusqu’à maintenant.
C’est une phase plus difficile, plus coûteuse qui commence. Cela demande beaucoup de lucidité, d’efforts, de concentration sur l’essentiel. Nous devons réussir. Nous l’avons promis à nos nombreux jeunes, à ceux qui ont perdu la vie, à ceux qui ont des blessures dans leurs corps, à ceux qui souffrent dans leurs cœurs.
Miassine reste fidèle à sa vocation et appelle ses amis – Arméniens, non-Arméniens, en Arménie et en Diaspora, à rester unis et solidaires et à ne pas abandonner le Rêve: voir l’Arménie forte et prospère.
«Cent femmes sans EUX mais… avec nous»
Ce sont des femmes qui vont prendre en main leur futur, pour les autres membres de leurs familles mais aussi pour ceux qui sont partis…
Fortes mais avec un fardeau en elles, avec le cœur brisé dans un pays qui a besoin de toutes ses forces vives, et tout simplement de continuer à vivre.
Ces femmes privées de leur maris, de leur fils, de leur père, de leur frère…, nous voulons les rassembler et les aider.
Les participantes de ce groupe pourront apporter réciproquement une aide psychologique en échangeant sur leur ressenti, leurs terreurs et leurs espoirs, en créant ainsi une chaîne d’amitié réconfortante, un allègement de la douleur par sa dispersion.
On sait bien qu’en Arménie la solidarité et l’amitié font partie du mode de vie, alors pourquoi créer un tel groupe? Tout simplement parce qu’elles partageraient une peine, une blessure, la même blessure que l’entourage ou les amis peuvent ne pas ressentir.
Mutuellement, elles apporteraient aussi un soutien matériel en agrégeant leurs compétences, en donnant du temps libre, en s’unissant pour former un projet, si modeste soit-il. Cela pourrait générer une véritable activité de groupe. Les Cent Femmes organiseront des ateliers de cuisine ou offriront de bons produits lors des sorties du dimanche pour faire refleurir des sourires au visage des enfants. Elles pourraient utiliser les ateliers de couture pour améliorer l’habillement des enfants. L’une a une jolie voix, l’autre joue très bien du piano. Elles pourraient s’initier à l’outil informatique, apprendre à conduire, organiser des sorties de groupe, s’épanouir autrement.
En initiant ce réseau, nous pensons à Marina, belle jeune fille de 18 ans, née dans une famille aimante. Avec ses grands-parents âgés et malades, son frère de 15 ans et sa maman femme au foyer, elle vient de perdre leur père qui était le soutien financier de la famille. Marina doit-elle arrêter ses études pour subvenir aux besoins de sa famille? Nous serons là pour la soutenir à poursuivre son rêve.
Greta, 24 ans, vient d’avoir son deuxième enfant que son mari, qui était déjà au front, n’aura jamais vu. Les amies de ce groupe pourront l’aider à élever ses enfants, la conseiller, lui donner du temps.
Notre rôle sera un rôle catalyseur, bienveillant et impliqué. Aider à ce que ces femmes expriment leur souhait et leurs vœux de manière claire et concrète afin que nous, les autres femmes du groupe, les aidions à réaliser leurs projets. Les aider à garder la conscience de leur féminité et de leur rôle irremplaçable dans la société. Nous leur organiserons des sorties culturelles dès que la situation sanitaire le permettra, des dîners, des concerts. Nous leur parlerons aussi de choses légères, de la mode et du superflu. Nous les ferons rire. Nous leur rappellerons les contes populaires arméniens. Nous les ferons réagir à la musique de Komitas, aux chansons d’Aznavour.
Il me semble que la misère serait moins pénible Ensemble…
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